Depuis qu’elle est arrivée en France en 2006, l’artiste Coréenne Sun Young Min a concentré son travail créatif sur la reproduction intuitive d’images florales en peinture acrylique. « Tout peut être exprimé par les fleurs » dit-elle, alors qu’elle mobilise le genre traditionnel occidental de la nature morte pour répondre aux questions de la jeunesse, de la mort et du passage du temps. Insistant de manière formelle sur le fossé entre jeunesse et maturité, Sun Young Min finalise de manière extrêmement précise certaines parties de sa peinture alors que d’autres sont à peine commencées. Parfois, elle écorche une partie de l’oeuvre, anticipant le processus naturel de décomposition. Avec une influence évidente de la peinture orientale traditionnelle, Sun Young Min canalise l’important choix de couleurs et le sens de l’espace qui définissent les paysages expressionnistes abstraits d’Helen Frankenthaler. Le travail de Sun Young Min fait aussi écho aux riches récits et aux palettes expressives de Cy Twombly, que Sun Young Min cite volontiers comme sa référence principale. Son processus créatif commence par une période intensive et profondément personnelle d’écriture. Elle ne travaille pas à partir d’esquisses ou de photographies de référence mais seulement en utilisant les errances tumultueuses, parfois humoristiques, de son esprit. « Mes esquisses sont mes textes » explique-telle, la préparant ainsi à compléter chaque cycle de son travail unique avec passion et rapidité. |
Les iris qui peuplent le Jardin coréen de Sun Young Min illustrent parfaitement la position unique de l’artiste entre l’Europe et l’Asie. La fleur, que beaucoup voit comme l’inspiration du symbole héraldique qu’est la fleur-de-lis, révèle aussi son côté oriental, étant une icône de la Corée où un arc en ciel de variétés fleurit à la fin du printemps et au début de l’été. Mais les iris de Sun Young Min ne sont pas seulement le sceptre d’un lieu et d’une identité, dans son travail ils sont devenus des créatures autonomes, chargées d’une palette d’émotions et d’énergies en constante évolution. Les dimensions importantes de son travail permettent aux fleurs d’avoir une corporéité dynamique qui implique une confrontation physique avec le spectateur. Ces derniers temps, Sun Young Min voit ses iris comme étant moins asiatiques et plus européens. Ses toiles, autrefois « timides et mystérieuses », « riches en bleus et violets », deviennent « confiantes, sexuelles… et même parisiennes ! ». La partie la plus intéressante de son travail est une confrontation visible entre les extrêmes. Sur ses toiles, l’orient rencontre l’occident avec la même intensité que l’inévitabilité de la mort fait face aux vibrations de la vie. — Lillian Davies Lillian Davies est historienne et critique d’art spécialisée en art moderne et contemporain. Elle est professeur de Beaux Arts au Paris College of Art et une contributrice régulière à différents magazines internationaux dont Artforum. |